Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Live
11 novembre 2007

L'unicité de Dieu et la création du monde

Le monothéisme absolu, affirmé dans la Bible, exemple unique de toute la pensée antique, permet d'organiser le monde à partir d'un principe unique. A partir du Dieu unique, tout peut être déduit, dans l'ordre du monde, sans qu'il soit nécessaire de faire intervenir des mythologies, qui n'auraient finalement qu'une valeur purement légendaire. L'affirmation monothéiste implique presque nécessairement une certaine forme de rationalisme qui sera, dès lors, capable de produire une explication de tous les ordres du monde : la seule volonté du Dieu unique s'imprime aussi bien dans les lois physiques que dans les règles éthiques. Tout l'ordonnancement de la pensée devient alors parfaitement cohérent, harmonieux : le Dieu unique est le garant absolu de l'ordre du monde auquel il imprime sa marque d'unicité.

C'est par l'affirmation de l'unicité absolue de Dieu que la pensée hébraïque entre en conflit avec toutes les pensées païennes : elle vide le ciel de tous les faux dieux qui le peuplaient pour ne placer au sommet de l'univers qu'un unique Créateur et maître de tout. Tout ce qui paraissait être adorable par les nations païennes n'est que fabrication hommes. La pensée biblique a opéré une véritable révolution et dans la conception de Dieu et dans la conception du monde : le monde et tout ce qu'il peut contenir est oeuvre de Dieu, et tous les autres dieux ne sont jamais qu'inventions humaines. Et la notion de création apparaît dès le premier verset de la rédaction biblique, même s'il faut reconnaître que l'expérience d'Israël ne se fonde pas tant sur la création que sur l'alliance conclue entre Dieu et son peuple. Des générations de commentateurs s'efforceront d'expliquer le comment de cette création, en faisant intervenir des concepts plus philosophiques : création "ex nihilo", création et non pas production ou fabrication. La révélation faite à Israël pose Dieu comme existant avant toutes les choses de ce monde : il est le créateur du ciel et de la terre comme il en est finalement l'aboutissement.

La philosophie biblique, qui est en définitive une négation de toute philosophie à échelle humaine, s'enracine sur la révélation que Dieu fait de lui-même. Et cette révélation est telle qu'elle s'impose aux hommes sans qu'il ne soit jamais nécessaire à toute la littérature biblique de parler de la vie de Dieu, de sa nature, de son histoire, de son existence éternelle. Il est au-delà de tout ce que l'homme peut connaître, il transcende l'univers qu'il a créé par sa seule parole, ainsi que le souligne le premier chapitre de la Genèse. Ce texte, très poétique, qui inaugure toute la Bible, décrit l'oeuvre créatrice de Dieu en des termes imagés, mais soulignant une progression soignée dans le dessein divin : en six phases, appelées " jours ", introduites chaque fois par ces mots " Dieu dit... ", il effectue toute son oeuvre par la puissance de sa seule parole. Et le sommet de cette oeuvre sera l'homme compris comme le couple, lequel exprime l'être humain dans sa totalité. Et pour exprimer cette création, l'auteur du récit de la Genèse emploie un verbe technique dans la langue hébraïque : Bara, qui signifie " faire quelque chose à partir de rien ", et cela, bien que la mentalité ancienne s'accommode mal de la notion même de " rien ". La tradition juive ultérieure expliquera ce " rien " par un rien de matière sans aucun doute, mais certainement pas par un rien de pensée : tout acte de formation, et à plus forte raison tout acte de création, commence par une parole de Dieu. Avant de créer, Dieu parle, et cela suffit pour que le ciel et la terre, les animaux et les hommes parviennent à l'existence. Il y aurait sans doute une illusion à vouloir, à tout prix, conserver la notion d'un rien initial absolu. La créature, au sens plein du terme, ne vient pas du néant pour accéder à une forme d'être : l'illusion d'un passage du néant à l'être vient de ce que tout ce qui existe tend vers Dieu. Les réalités créées connaissent un mouvement ascendant, une finalité en Dieu qui est la forme suprême et absolue de l'être, au sens traditionnel de la philosophie. Les créatures effectuent en quelque sorte un retour à l'être dont elles sont issues. Si le juif croyant tend à la perfection à la sainteté, s'il tend à remonter vers Dieu, c'est parce qu'il a conscience de venir de Lui et qu'il cherche à retourner à son Créateur. L'illusion vient d'une erreur de perception d'un interprète qui n'a pas pénétré dans le domaine de la foi, car il faut souligner que la création relève de l'acte de foi lui-même.

Dire que Dieu crée le monde est une forme de profession de foi, alors que la notion d'un avènement du monde relève, quant à lui, du domaine des sciences naturelles et physiques, lesquelles peuvent entreprendre une généalogie du monde à partir des éléments premiers.

Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité